Bixente fut le premier debout et réveilla le reste du groupe.
« Bougez vous les gars, on dirait que vous avez pas dormis de la nuit. »
Hippie bailla longuement :
« On n’a pas dormis dans un lit nous. »
Ils sortirent en silence de l’auberge et marchèrent en direction de la place publique. Personne ne parlait maintenant, chacun pris dans ses pensées et ses rêves.
Ils arrivèrent au lieu de rendez-vous et distinguèrent deux ombres se profiler dans l’aube naissante. En s’approchant ils reconnurent leur embaucheur de la veille, accompagné d’un homme plutôt grand, de bonne carrure, la trentaine, châtain et les cheveux longs noués en queue de cheval. Il possédait une épée, une gourde en peau de chèvre et une torche. Ses vêtements étaient de couleurs marron, beige et vert.
-Voilà Fred, il sera votre guide jusqu’au donjon.
Celui-ci fit un bref signe de tête, il ne semblait pas particulièrement bavard.
L’autre tendis des armes aux quatre jeunes gens.
Je vous les ai apporté, comme promis.
Arthur rouspéta :
-Mais elles sont de mauvaise qualité et toutes rouillées !
-Qu’est ce que tu croyais ? C’est ça ou rien.
Ils prirent chacun une machette, sauf Ulysse qui prit une serpe et qui la regardait avec un sourire sadique assez inquiétant.
-Le lieu est à environ une demie-journée de marche. Selon nos informations le parchemin que vous devez nous ramenez serait dans une tombe au sommet du donjon et…et…
Hippie termina :
-Certains ne sont pas revenus.
L’homme lui jeta un regard sombre avant d’ajouter :
-C’est exact. Maintenant vous pouvez toujours changer d’avis si vous n’en avez pas le cran.
-On y va.
-Je savais que je pourrais compter sur vous, je vous laisse, j’ai à faire. Bonne chance !
Il se retrouvèrent seuls avec Fred qui leur demanda :
-Vous êtes prêts ?
Ils acquiescèrent de la tête.
-Alors, allons-y.
Au bout d’une demi-journée de marche à travers la forêt ils arrivèrent. Un imposant bâtiment se dressait devant eux. Le donjon était immense, lugubre et semblait complètement envahi par le végétation. On pouvait apercevoir des arbres se pencher à son sommet et un lierre énorme passait entre les pierres centenaires. L’ensemble donnait une impression malsaine, comme si la nature était devenue folle et le lieu maudit. Il n’y avait qu’une porte, grande ouverte sur l’obscurité, peu invitante à entrer et donnant froid dans le dos.
Fred alluma sa torche et la leur tendis.
« Ne la perdez surtout pas ! Je vous attends jusqu’au soir, après je considérerais que vous êtes morts. Bonne chance. »
Les quatre jeune gens se demandaient s’il n’avaient pas fait une grosse erreur en venant ici. Arthur prit la torche d’un bras tremblant puis émit d’une petite voix cassée :
« Merci. »
Ils restèrent un instant devant l’entrée béante, indécis, puis, plus pour ne pas perdre la face que par réel courage ils avancèrent lentement et s’engouffrèrent dans l’obscurité.
L’air était étouffant à l’intérieur et l’atmosphère pesante, oppressante. Bixente marchait devant, la torche à la main, les autres suivaient de près pour ne pas trébucher sur les pierres inégales du sol. Ils apercevaient d’énormes rats s’enfuir sur leur passage. Ils continuèrent de marcher ainsi longtemps, déambulant dans les sombres couloirs. Ils n’auraient pus dire combien de temps car dans le noir ils perdaient toute notion du temps. Au bout d’un moment ils arrivèrent enfin à un étroit escalier en colimaçon. Ils montèrent le plus silencieusement possible, comme par peur de réveiller quelque chose et vérifiant chaque marche avant de poser le pied dessus. L’ascension fut longue et exténuante mais finalement ils distinguèrent de la lumière et émergèrent au sommet de la tour.
Ils étaient dans un lieu totalement envahi par la végétation, notamment un gigantesque lierre.
« Il fait encore jour. » fit remarquer Bixente.
« Il s’agit maintenant de trouver ou ce cache ce parchemin » déclara Hippie.
Ils se mirent alors à chercher. L’endroit était assez grand et les possibles cachettes multiples. Mais nulle trace de tombeau ou de quoi que ce soit de ressemblant. Le soleil déclinait à mesure que le temps passait. Désespérés, les quatre jeunes gens s’accordèrent une courte pause.
Bixente pensait à voix haute :
« Réfléchissons, il ne doit pas être bien loin. »
« Moi, j’abandonne. » dit Arthur en s’appuyant sur le rempart. Mais une pierre, male cimentée, se déroba et chuta dans le vide, percutant et rebondissant sur les aspérités du mur. Elle emporta avec elle Arthur qui disparut de la vue de ses trois camarades. Ils crièrent tous en même temps, puis un silence, un silence de mort, effroyable. Tout d’un coup la voix d’Arthur s’éleva du vide :
« Eh les mecs, venez voir. »
Les trois autres réagirent de différentes manières : Bixente fit un bond en avant, Hippie faillit piquer une crise de nerfs et Ulysse resta la bouche grande ouverte et les yeux écarquillés.
Bixente était maintenant penché en avant là ou le mur s’était écroulé et s’écria tout joyeux :
« Il est tombé sur une corniche ! »
Hippie s’approcha :
« Fais voir ! »
Effectivement Arthur était sur une corniche avancée, les coudes et les genoux en sang mais dans toute son intégrité physique.
-Merde, tu nous a foutu la trouille !
Arthur répondit :
-Je crois que j’ai trouvé, c’est une sorte de tombeau. Il y a un squelette qui tient un petit coffret.
Bixente exultait :
-Prends le ! Ca doit être ça !
Arthur retira délicatement le coffret des mains du squelette.
-C’était pas si difficile que ça tout compte fait.
A ce moment là il sentit quelque chose lui attraper le pied et le tirer brusquement en arrière.
-Attention Arthur ! Le lierre bouge !
-WAAAAAH !
En effet le lierre qui avait envahi tout l’étage s’animait et essayait de le tirer en arrière, qui, lui, s’accrochait de toutes ses forces à des pierres du mur. Il dégaina sa machette et frappa le lierre avec une telle force que sous le choc elle lui échappa de la main, dégringola et resta suspendue au dessus du vide, accrochée par une plante du mur. Le gardien du tombeau , blessé, se retira de la cornière puis repassa à l’offensive. Bixente et Hippie se défendirent et essayèrent de porter secours à Arthur, mais ils n’arrivaient pas à avoir suffisamment de répit pour le faire remonter.
« Ulysse ! Aides nous ! »
Ulysse n’avait toujours pas bougé ou dit quoi que ce soit depuis la chute d’Arthur, mais en entendant les cris d’appel au secours et en voyant ces amis en danger il s’opéra une sorte de déclic en lui. Alors lentement sa main droite se dirigea vers le manche de sa serpe qu’il prit délicatement et il s’immobilisa. Des gouttes de sueur perlaient sur son front. Soudain, il releva brusquement la tête et chargea, serpe au vent et hurlant un terrible cri de guerre. Voir Ulysse attaquer des plantes avec une serpe c’est quelque chose qu’il faut faire au moins une fois dans sa vie. Tel un ancien dieu guerrier d’âges oubliés il faucha, coupa, frappa, déchira, meurtrit et hacha le monstre avec une rage, une fureur et une détermination qu’on ne lui connaissait pas. Finalement le lierre, en lambeaux, dut battre en retraite. Peu à peu Ulysse reprit le contrôle de lui-même. Ses veines transparaissaient sur ses tempes et il était complètement en sueur. Son arme lui glissa des mains et il perdit conscience.
Lorsqu’il rouvrit les yeux il comprit qu’il était allongé par terre au pied du donjon, entouré de ses amis et de Fred qui était penché sur lui. Ce dernier essayait de lui faire avaler une liqueur assez forte.
-Bois, ça va te remonter.
Il recracha une partie de la boisson qui était du vin épicé.
-Est ce que ça va ? demanda Bixente.
Ulysse fit oui de la tête.
-Tu ferais un bon jardinier. Comment est ce que tu l’as massacré !
Puis se tournant vers fred.
-Qu’est ce que c’était d’ailleurs ?
-Un esprit des plantes invoqué pour défendre l’artefact. C’est un sort très puissant, vous avez eu de la chance de vous en sortir, beaucoup de chance. Vous avez le parchemin ?
Hippie montra le coffret qu’Arthur avait pris dans la tombe mais ne le donna pas.
-Si ça ne vous déranges pas je préfère le garder jusqu'à ce que nous touchions notre paye.
Fred était contrarié mais dut se résigner. Comme Ulysse pouvait marcher ils partirent tout de suite pour Ragata. Sur le chemin Hippie et Bixente demandèrent des informations à Fred sur l’Association Des Intrépides Aventuriers.
-L’ADIA est une organisation composée d’hommes et de femmes de tout bord. La plupart de ses actions sont à but lucratif ou pour étendre son pouvoir. Gilbert Boisbouvier en est le chef.
-Et vous en faites partie ?
-Il faut bien vivre.
Ils arrivèrent à Ragata le soir et l’homme qui les avait embauchés, après avoir vérifié son contenu, opéra à l’échange du coffret contre les cinquante pièces d’or restantes. Les quatre jeunes gens restèrent seuls sur la place pour se partager l’argent puis s’assirent sur des marches. Tout était calme et seule la Lune était témoin de la scène. Bixente demanda aux autres :
-Vous allez faire quoi maintenant que vous avez l’argent ?
Personne ne répondit. Il continua :
-Je me demande ce qu’il pouvait y avoir de si important sur ce foutu parchemin.
-Moi je sais.
C’était Hippie qui venait de prendre la parole. Les trois autres se regardèrent interloqués.
-Quoi ?! Tu sais ce qu’il y a de marqué dessus ?!
-Oui, je l’ai lu en cachette sur le chemin du retour.
-Et alors ?
-Il n’y avait de marqué qu’une seule phrase très énigmatique : « IL FAUT TROUVER LA VOIE .»
FIN